L’Armée mauritanienne du recrutement à l’avancement: Radioscopie de deux mamelles à surveiller
La valeur du militaire en général et de l’officier en particulier ne se mesure pas par le nombre d’années d’étude, ou par sa caverne d’Ali Baba, mais tout simplement par son professionnalisme qui doit réverbérer un comportement irréprochable.
A chaque fois qu’on se penche sur une entité à caractères humain ou animal, l’on constate qu’elle nécessite une force destinée à la sécuriser. Dans le règne animal nous avons l’exemple parfait de l’organisation de la fourmilière quand même qu’il y a des soldats qui protègent la reine de toute intrusion extérieure.
Et dire que l’instinct grégaire chez les fourmis, permet aux soldats de jouir de dispositions et de statut particuliers. Aussi, là où il y a un groupe de personnes, il y a toujours eu des hommes et des femmes ayant pour mission de les soustraire des agressions de leurs semblables, les humains.
Dans les sociétés modernes constituées en états-nations ce rôle est dévolu à l’institution militaire et la Mauritanie ne souffre pas d’exception. Mieux, en République islamique de Mauritanie, l’Armée est plus que nécessaire car c’est d’elle que dépend la stabilité du pays dans un environnement socio-culturel tumultueux, très peu poreux, en tout cas jusqu’à nos jours, à l’encrage de la notion de nation.
Si l’Armée est indispensable à l’existence même de notre pays, elle se doit donc d’être elle aussi exemplaire dans tous les domaines inhérents à son organisation intérieure et professionnelle; ce qui demande plus de justice et d’équité pour tous. Ainsi le principe primordial civique veuille qu’on rentre dans l’Armée par patriotisme en ayant comme ambition d’avancer de grade en grade, jusqu’au sommet de la hiérarchie, qui ouvre souvent les portiques de la gloire.
En effet le seul avantage légitime qu’on peut tirer d’une carrière militaire, c’est l’avancement au mérite. Ni plus, ni moins. Il arrive que durant sa carrière, l’on obtienne un commandement « juteux », comme on dit, ou un poste de « privilège ». Tout cela n’est qu’un épiphénomène, un appoint en trompe-l’oeil qui ne doit point influer sur les vertus cardinales d’un militaire valeureux, mais au contraire, ce genre d’émoluments ne doit être qu’une sorte d’ aide-pédagogique destinée à raffermir l’officier dans l’exercice de sa noble mission.
Ceux qui procèdent donc au recrutement sont responsables du meilleur avenir de leur Armée, et ils doivent répondre de leurs actes en cas de failles. Quant à l’avancement, ceux qui le décident et ayant de ce fait obtenu le statut de décideurs, doivent savoir qu’ils ont plus de responsabilité morale vis à vis de leur Armée que les recruteurs. Car de leurs seules décisions prises à partir du plus petit échelon de l’unité élémentaire, dépendent alors les futures défaites ou mieux, les nécessaires victoires qui seront consignées dans les annales de l’histoire de la nation, lors de la marche à l’ennemi.
N’oublions pas que le seul salut du militaire est de combattre de l’exorde à l’épitaphe, autrement du début jusqu’à la mort. Ceux qui n’ont pas cette maxime à l’esprit, trahissent leur patrie dès leur recrutement. On ne vient pas dans l’Armée pour chercher ni argent, ni plaisirs hédonistes, mais plutôt pour une gloire spartiate, s’il le faut par les « larmes et le sang » selon l’expression de l’ancien premier ministre anglais W Churchill.
A/ Le recrutement:
Si vous devez construire une maison mais hélas avec un soubassement en cendre, vous récolterez les conséquences néfastes plus tard !!! C’est pareil pour l’Armée nationale depuis quelques années. Le recrutement des officiers est devenu un casse-tête pour l’Etat-Major National. Même si on exige le baccalauréat pour le recrutement des EOA (élèves officiers d’Active), celui qui l’a passé, l’a souvent obtenu frauduleusement, ou a falsifié le diplôme. Il est rare de trouver des élèves au niveau acceptable, puisqu’ils sont souvent enfants de ministres, de politiciens véreux ou de hauts gradés exerçant dans les forces armées et de sécurité.
Pour parer à la dévaluation des moeurs et de l’éthique qui gangrène certaines couches aisées, il est préférable de recruter les futurs cadres de l’Armée chez les classes moyennes, les couches défavorisées qui détiennent encore le sens des valeurs ancestrales, de l’opiniâtreté dans le travail et surtout de probité. Le niveau intellectuel n’est pas le seul critère d’aptitude à vouloir embrasser une carrière militaire.
La moralité, l’intégrité physique, le civisme sont des critères sérieux à prendre en considération. Il faut éviter de recruter des drogués, des alcooliques, des délinquants etc…au péril d’avoir des unités militaires commandées par des officiers de mauvaise moralité, inaptes au commandement, pour que le jour « J », ils prennent la poudre d’escampette devant l’ennemi. Or le propre d’un militaire engagé , c’est de combattre dignement jusqu’à la mort. Il faut respecter la mémoire de ceux comme Soueidatt Ould Wedad, Ba Ibra Demba, Dieng Nadhirou, Tajou, Abou Diakité etc.. qui sont partis combattre et qui sont tombés au champ de l’honneur.
N’oublions pas non plus de valoriser la mémoire du soldat inconnu, matérialisée par la mort de milliers d’entre eux (militaires du rang et cadres sous-officiers). Il faut toujours penser à ces(ses) frères d’arme, disparus pendant la guerre du Sahara ou sous les feux des terroristes, ou ailleurs.
B/L’Avancement:
Une fois qu’on est recruté, le noeud gordien à toute carrière militaire est un avancement qui doit se dérouler selon les normes édictées par le règlement militaire en vigueur Si l’avancement est au choix du commandement, ce dernier ne peut se baser que sur des critères de vérité comme en sciences normatives. Le contraire de ce contrat biaiserait la trame intellectuelle qui court à travers l’étanchéité de la notion même de justice militaire. Un chef qui donne des ordres au nom du droit et exige qu’ils soient appliqués, se doit d’être lui-même irréprochable, équitable dans ses actions, juste dans ses prises de décisions.
Au début dans l’Armée l’avancement était une histoire de parentèle, de copinage, pire de corruption passive. Après un quart de siècle dans la grande muette, après 6 années de grade de sous-lieutenant, 11 ans de grade de lieutenant et 7 ans de grade de capitaine (jusqu’au 8 juin 2003),je suis en mesure de parler du sujet avec des preuves irréfutables. Heureusement que depuis le milieu des années 2000, les choses ont commencé à changer, avec le général Ghazwani comme chef d’état-major.
Sauf pour le grade de général, dont le monopole était entre les mains du président de la république, Mohamed Ould Abdel Aziz, jusqu’en 2019.. Depuis 2 à 3 ans la question du recrutement et de l’avancement commencent à capter l’attention des chefs. L’actuel Cemga le général de division Moktar ould Bollé Chaabane n’appartient à aucune tribu. Depuis 1979 que je le connais, je ne l’ai jamais entendu parler de son appartenance à tel ou tel ensemble tribal, contrairement à la majorité des mauritaniens, moi y compris.
Pourtant c’est cette appartenance supposée tribale ou ethnique qui empêche la Mauritanie de se hisser au rang de nation en général et à l’armée de se défaire de ses tares congénitales. Ce n’est pas pour rien qu’on parle d’officiers de l’ Adrar, d’officiers de l’Est, d’officiers Peuls etc…C’est Maawiya qui a commencé avec le régionalisme. Avant la démocratisation du pays, tous les commandants des régions militaires étaient des officiers de l’Adrar, de facto membres du comité militaire.
Avec la création du Basep à la fin des années « 80″, pour servir dans cette unité présidentielle, votre maman devrait accoucher au-delà de Oum Tounsi, ou au-delà ou en deçà d’Akjoujt. Le 1er CPOS (1985-86), les sujets ont fuité. L’appartenance à la tribu du secrétaire chargé de la correction des sujets, quand il y a un test d’admission au brevet de capitaines, détermine les résultats. Car seul le secrétaire connaît le numéro secret donné à chaque candidat.
A deux ou trois reprises les intéressés font admettre le maximum de leurs cousins. Malheur aux officiers compétents qui n’ont jamais voulu tricher !!! Tout ça est du passé, car les officiers se bousculent désormais au grade de commandant (DEM: diplôme d’Etat-major) et au grade de colonel (BMS: brevet militaire supérieur).Franchement avec le Cemga actuel Moktar Ould Bollé, qui n’a ni « cousin ni oncle » dans l’Armée, les choses commencent à changer; dans tous les domaines structurel, social, professionnel. Mais le chantier est vaste, même si la volonté y est.
Quand un chef n’est pas trop porté sur l’argent, il peut « rendre à César, ce qui appartient à César « .Actuellement tout va dans le bon sens et les gens commencent à se défaire des vieilles habitudes nuisibles à l’image du pays et à son Armée. Et c’est tant mieux./.
ELY SIDAHMED KROMBELE, FRANCE
Source Cridem