Face aux coups d’État : Le cynisme des réactions internationales dévoilé
J’ai pris la liberté de retoucher cet article du vénérable professeu Ely Mustapha écrit après le coup d’Aziz, je l’ai adapté au contexte actuel ( Niger Mali Burkina )
Merci Professeur
Montesquieu ou Machiavel ?
Lorsqu’un coup d’État éclate, les réactions des États et des organisations internationales affluent, souvent teintées d’un pragmatisme qui rappelle le vrai visage de la « communauté internationale ». Si l’on devait choisir entre Montesquieu, l’apôtre des lois, et Machiavel, maître de la ruse et du pouvoir, où se situerait la posture de ces acteurs sur l’échiquier mondial ?
Le cynisme des positions internationales
Les réactions aux coups d’État sont rarement motivées par des principes de légalité ou de justice. Les intérêts priment, comme l’illustrent les Jeux olympiques organisés en Chine, un pays accusé de multiples violations des droits de l’homme. À l’inverse, les interventions militaires en Irak ou la question de la Palestine continuent d’alimenter une hypocrisie latente. Devant un putsch, un florilège de déclarations émerge : celles qui condamnent, celles qui soutiennent, et celles qui manient les mots avec prudence.
Les condamnations sans détour
La première catégorie de réactions est la plus directe. Des condamnations fermes, sans ambiguïté : « Nous condamnons fermement ce coup d’État, demandons un retour immédiat à l’ordre constitutionnel et la libération des dirigeants détenus. » Mais ces condamnations, bien qu’apparemment rigoureuses, sont souvent soumises à la dynamique du terrain. La réalité montre que nombre d’organisations internationales ne se privent pas d’envoyer des délégations pour « évaluer » la situation avant de statuer sur la gravité du coup d’État. Cette attitude soulève une question : un putsch contre un régime démocratique reconnu mondialement ne devrait-il pas être immédiatement condamné, sans équivoque ? Pourtant, ces mêmes organisations tergiversent et ajustent leurs positions au fil du temps, prenant parfois le parti d’entériner un nouvel « ordre constitutionnel ».
Le soutien déguisé et la solidarité inattendue
La deuxième catégorie de réactions s’inscrit dans une forme de soutien, parfois implicite, parfois totalement assumé. Certains partis politiques ou groupes de pression, au lieu de condamner, trouvent dans le putsch un salut pour la nation : « Nous nous opposerons à tout retour de l’ancien président. » Le discours est clair : il s’agit ici de solidarité avec les putschistes, un terme rarement utilisé mais qui reflète une certaine adhésion civique à l’action des militaires. D’autres, plus subtils, prennent simplement « acte » du changement, une formule passe-partout qui équivaut à une reconnaissance tacite du nouvel ordre.
L’acceptation contrainte du fait accompli
La troisième catégorie, plus nuancée, exprime une consternation mesurée, mais accepte le fait accompli. « Nous rejetons la prise du pouvoir par la force, mais il serait irresponsable de ne pas reconnaître la nouvelle réalité. » Ici, la condamnation devient une formalité, tandis que l’on appelle à des élections pour redonner un semblant de légitimité. Ce mélange d’opposition et d’acceptation rappelle le stoïcisme des anciens Grecs, quoique teinté d’un pragmatisme plus moderne, comme l’écrivait Jonathan Swift : « Cette méthode stoïque de subvenir à ses besoins en supprimant ses désirs équivaut à se couper les pieds pour n’avoir plus besoin de chaussures. » Le compromis devient la norme, et le parti se transforme en bouclier contre toute intervention extérieure qui pourrait nuire aux putschistes.
L’observation cynique
Enfin, la quatrième catégorie est sans doute la plus révélatrice du cynisme ambiant. Les coups d’État suscitent des réactions, certes, mais au fond, les lignes de fracture entre partisans et opposants se dissolvent rapidement lorsque les intérêts convergent. La capacité des militaires à résister et celle de leurs détracteurs à tenir sont les seuls véritables paramètres. Les déclarations, qu’elles soient pour ou contre, ne sont finalement qu’une danse autour du pouvoir, dont le tempo est dicté par des calculs froids et pragmatiques.
Montesquieu ou Machiavel : Le duel philosophique
Face à cette réalité, la question demeure : sommes-nous en train de revivre Montesquieu, avec ses idéaux de séparation des pouvoirs et de respect des lois, ou Machiavel, avec sa vision crue du pouvoir, détachée de toute considération morale ? L’histoire semble osciller entre ces deux pôles, laissant planer le doute : dans l’esprit des lois ou dans l’esprit des rois, lequel finira par prévaloir ?
Professeur Ely Mustapha