Les écuries d’Augias ou de l’impossible moralisation de la politique en Mauritanie

Les élections présidentielles du 11 mars 2007 ont soulevé un vent d’espérance parmi le peuple mauritanien. Les mauritaniens avaient vraiment cru vivre dans un pays nouveau, démocratique et régénéré. Ces premières élections démocratiques nationales étaient censées être un levier décisif pour le changement d’une Mauritanie enfin réconciliée avec elle même et décidée de tourner à jamais le dos à la dictature Tayiste et à son oligarchie, porte-étendard de la corruption et de l’idéologie d’exclusion.

Mais ils eurent tôt fait de déchanter, leur président élu pour opérer les changements « rassurants » escomptés, s’étant révélé être l’otage force ou consentant de l’ordre ancien honni, renversé par un pronunciamento militaire aux motivations équivoques et ambivalentes.

L,oligarchie corrompue semble avoir réussi à enserrer le nouveau président dans un décors figé à tout jamais, ou tout se déroulerait conformément aux scénarii par elle concoctés et dont les objectifs avoués sont l’anihilation de l’Etat de droit incompatible avec l’incurie et la corruption ainsi que la confiscation du processus démocratique. Il va de soi que le programme sur la base duquel a été élu Mr Sidi ould Cheikh Abdallahi subira une inflexion à 360 degrés pour correspondre aux désiderata de ceux qui l’ont porté au pouvoir à coup de millions en « collectant » les voix de ceux qui n’ont eu d’autre liberté que celle de voter pour leurs bourreaux.

Et ils sont bien décidés à rentabiliser leurs placements. Ayant cherche et obtenu son adoubement par eux, Mr le président est désormais leur oblige et en guise de reconnaissance, il se croit tenu de les convier au festin d’une Mauritanie exsangue. Ce faisant, il aura sciemment ou pas, choisi de prendre le chemin assure d’une inéluctable descente aux enfers contre celui plus gratifiant mais aussi plus difficile des reformes nécessaires pour relever un pays mis a sac par ceux la mêmes dont il s’est entoure.

De toutes façons, il n’a guère le choix car pour réussir la destruction planifiée et organisée du pays et l’étouffement a l’état embryonnaire de notre démocratie il ne pouvait s’adjoindre meilleures compétences. Les services qualifiés des experts liberticides et corrompus de la confrérie Tayiste s’imposent en passage oblige pour qui veut intégrer le noviciat de la concussion.
 
Des lors, on ne peut que constater avec dépit et impuissance, la réappropriation du pouvoir par ceux qui ne l’ont vraiment jamais perdu et la mise en coupe réglée de tout un pays par ceux que j’appelle les « stakhanovistes de la concussion a la chaine« . Tout cela ne contribuera certes pas au renouveau de la vie publique tant attendu par l’écrasante majorité des mauritaniens et l’image qu’ils se font de leur président élu s’en sort sérieusement écornée et il est a craindre qu’il la trainera a jamais comme un boulet dans la mémoire nationale.

Mon indignation personnelle retentit en écho a la clameur dénonciatrice de tout un peuple floue, déçu ,rejetant le camouflet de l’usurpation de ses biens ,de sa liberté, de son vote, de sa réconciliation, de son éducation, de sa sante, de son pain, de son riz, de son blé, de son mil, de ses terres, de son pétrole, de son fer, de son poisson, de ses chameaux, de ses vaches ,de ses moutons de ses poulets, de sa faune ,de sa flore, de son or, de ses phosphates, de ses diamants, de ses pierres précieuses, de son désert, de sa sécurite, de ses impôts, de son épargne, de l’APD, de la sueur de son front, de ses larmes, de son sang par une clique de flemmards interchangeables.(Ceci n’est pas une figure de style, ces ressources sont en fait honteusement pillées).

Face au retour en force de ces individus, le principe de précaution aurait du s’imposer, je crains hélas qu’il ne soit déjà trop tard. Le cordon sanitaire que je propose n’est même pas dicté par des considérations politiques. Non! Il ne s’agit plus prosaïquement que de questions d’éthique et d’une certaine conception de la démocratie. La gestion de la chose publique requiert en effet un minimum de morale et de probité, or le passe de ces hommes et de ces femmes les disqualifie de facto.

Dans un Etat de droit ces personnages, toutes allégeances politiques confondues, auraient été jugés, punis ,jetés en prison, révoqués, frappés d’inéligibilité…etc . Au lieu de cela ,il se précise de plus en plus nettement que l’on veuille donner un pouvoir en blanc a ces criminels économiques dont beaucoup ont aussi du sang sur les mains.

Je le dis et le répète mon indignation présente ne tient pas compte, pour ces cas précis, de l’appartenance politique de ces multi- récidivistes, car ils se sont disséminés dans tous les partis. Elle se base sur des faits criminels et délictuels avérés commis au vu et au su des 3 millions de témoins a charge que compte la Mauritanie. Je n’invente rien, mes accusations sont très certainement, bien en deca de la triste réalité.
 
J’en viens maintenant a un autre point qui laisserait injustement supposer que j’aurais de la condescendance pour l’équipe gouvernementale semi-technocratique en place. Si j’en parle c’est a cause de certaines prophéties auto-réalisantes, sans doute inspirées par l’oligarchie néo-Tayiste et puissamment relayées par certains bonimenteurs voulant nous faire croire que l’échec du gouvernement serait du a son manque d’expérience politique et que le retour des « caciques empoussiérés » serait la panacée a nos maux structurels. Tout un programme ,honni soit qui mal y pense! En fait un vrai scenario-catastrophe , un cauchemar.

On voudrait aussi nous faire croire que, le recours a ces gens, dont l’expérience politique se résume en un seul mot, CORRUPTION, s’impose pour sauver le pays et concrétiser le programme pour lequel le président Ould Cheikh Abdallahi a été élu. Mais de quelle maturité ou sagesse politiques peuvent se prévaloir ces suppôts du dictateur Taya, toujours prompts a bruler ce qu’ils ont adoré?

Je monte au créneau pour clamer qu’il n’y a pas d’alternative crédible à attendre de ces « saigneurs » réfractaires invétérés a toute enculturation morale ou civique. Sans me faire d’illusions ou donner dans l’angélisme beat mon choix impose est clair. De deux maux, je choisirai pour mon pays le moindre; entre la peste et le cholera le choix est vite fait.

Il me semble qu’un gouvernement semi-technocratique compose d’éléments qui n’ont pas trop trempé dans les eaux vaseuses de l’électoralisme Tayiste et post-Tayiste et qui ont toujours vu la gestion des affaires publiques du promontoire du savoir-faire serait a même d’expédier les affaires courantes pour les quatre années restantes .Je n’en attends guère plus. L’establishment au credo décidemment inchangeable et inchangé devrait être a jamais confiné aux oubliettes .

Un terme doit enfin être mis a la félonie et la corruption institutionnalisées pratiquées sans aucun état d’âme par la vieille garde. Il importe de faire coute que coute barrage ,encore une fois, a ces politicailleurs incompétents qui ne connaissent de Machiavel que le slogan trivialisé de « la fin justifie les moyens« . Absolument tous ,y compris les plus vils.
 
Il y va de l’avenir de notre pays et de notre démocratie, faute de quoi les élections de mars 2007 n’auront été qu’une parenthèse, une péripétie ,les résultats d’une hallucination ou d’une amnésie collectives. Le président lui même ne s’en est pas caché, il a reconnu que certaines forces de la nébuleuse disparate et hétéroclite qui s’est formée, en génération spontanée autour de sa personne, le poussent a restreindre les libertés démocratiques. Il aurait, a l’en croire, jusqu’ici tenu tête.

Mais jusqu’a quand réussira t-il a endiguer les vélleités totalitaristes qui commencent a sourdre de son propre camp? De quelle marge de manoeuvre disposerait- t- il face au rouleau compresseur des oligarques neo-Tayistes? De combien de temps disposerait- t il encore? Sur quelles soutiens réformistes peut il compter? Existe t il des forces contraires capables de l’extirper de l’engrenage liberticide qui l’a happé, a son corps défendant concédère-je peut être? Mais le veut-il seulement? Autant de zones d’ombre inquiétantes dont l’opacité mérite d’être percée.

Force m’est de constater que les forces de la régression démocratique ont pris de l‘ascendant et gagne en mordant, leurs hargne et agressivité sont dopées par la cupidité a la perspective d’empocher les 2,1 milliards de Dollars promis par le Groupe Consultatif de Paris pour la Mauritanie. Et ce genre d’appétit fait beaucoup d’émules et attise, malheureusement, bien de convoitises et de complicités potentielles jusque parmi les plus insoupçonnables, hélas.

Il ne nous reste plus a nous autres défenseurs de la démocratie assiégée dans ses derniers retranchements qu’une ultime bouée a laquelle nous pouvons nous accrocher pour faire obstacle au tsunami dévastateur de l’incurie: espérer des institutions financières donatrices une conditionnalité stricte, étroite liant l’aide a la démocratisation, la bonne gouvernance, la crédibilité, la moralité la compétence…etc Autant de critères que ne remplissent pas la plupart des oligarques. Même ce cas de figure très plausible ne nous sortirait pas de l’auberge car en face ils ont aussi leurs technocrates et autres redoutables polémistes ,cerbères dociles au service de la mauvaise cause.

Mais alors que faire? Au terme de ce commentaire je comprends mieux la solitude du président sans pour autant l’excuser. Tout n’est peut être pas perdu. Hercule a bien réussi a nettoyer les écuries d’Augias encrassées par trente ans de fumier.

KHALIL BALLA GUEYE
Consultant
DÜSSELDORF-R.F ALLEMAGNE
ballag@web.de



Un commentaire

  1. abbass dit :

    Excellent article ,écrit dans un francais chatié peu courant parmi le commun des mauritaniens.
    Le fond et la forme s,harmonisent bien à mon sens.
    Il parait que Mr Gueye serait un diplomate de carrière brouillé avec le régime.Il a du être certainement écoeuré par la médiocrité ambiante.

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